Le dernier des corbeaux

Dans un ciel noir, vole un oiseau noir. Cet oiseau n’y voit pas grand-chose, et pour cause, dans ses déambulations, les embûches se succèdent. Se cogner dans un poteau électrique, certes, ça peut arriver, après tout. Oiseau noir s’y cogne, s’électrocute, mais il reprend son vol, vaillant et l’air serein. Puis il connaît de nouveaux démêlés, avec une bouteille de soda, une flaque noire collante et gluante, un fatras de déchetterie, des égouts peu ragoûtants… ça fait un moment déjà que le corbeau ne vole plus. Il marche, la mine renfrognée, il se laisse aller au cours de l’eau, résigné. Mais l’histoire n’est pas encore terminée. Et si c’était le dernier des corbeaux ? Dans ce noir, comment pourrait-on y voir ?

On pourrait croire que cet oiseau est bien malchanceux, que nous avons affaire à une sorte de mal dégourdi qui devrait lever la tête et regarder où il va. Dans cet album, il est pourtant surtout question d’une certaine espèce humaine, et de sa façon bien à elle de transformer la terre en décharge publique.

N’allez pas croire que cet album est triste. Bien au contraire, tout ça est traité avec humour. A la manière du rire malicieux mais tout aussi compatissant et solidaire lorsque l’on voit quelqu’un tomber dans la rue parce qu’il a loupé une marche. Cette aventure lucide et pleine de verve pourrait être le reflet d’une histoire vécue. D’ailleurs Thierry Moral est conteur, peut-être l’a-t-il vraiment rencontré cet oiseau noir… L’écriture est à la fois moderne, urbaine, mais tout aussi fine. Les mots sont pensés, choisis, pour nous porter dans cette chronique de la vie ordinaire. De son côté, Sébastien Naert a dessiné pour l’occasion un oiseau expressif, sympathique, qui enchaîne les bévues et a du ressenti. Ces grands dessins mis en forme à l’italienne nous transportent dans l’histoire, où l’on suit cet oiseau noir, qui évolue, dans le noir.

Nous avons là un livre proche du fait maison comme ça fait plaisir à voir, nous pourrions même parler de création plastique. Le papier est de très bonne qualité, l’impression est excellente, et le sens du détail est vraiment appréciable.

Cet album s’adresse aussi bien aux enfants qu’aux adultes. Aux enfants qui aiment les histoires, à ceux qui préfèrent les écouter, aux ados et adultes qui lisent de la bande dessinée, qui sont sensibles aux illustrations que peut proposer un livre. A tous ceux qui apprécient les livres engagés.

A lire, mais surtout, à raconter.

« Dans un ciel noir
Vole un oiseau noir
Fichu poteau électrique
Corbeau n’a pas de sonar
Ni de pouvoir magique
Pour se diriger dans le noir
Corbeau s’électrocute
En se posant sur le câble
Décidément on le persécute
Sa vie devient insupportable
Dans un ciel noir
Vole un oiseau noir »

Le dernier des corbeaux, de Thierry Moral et Sébastien Naert. édition Téètras Magic
Merci aux Agents littéraires et aux éditions Téètras Magic pour cette belle découverte. 

Les Agents littéraires est un blog collectif qui a pour objectif la promotion du livre, particulièrement ceux issus des petits éditeurs et auteurs auto-édités.
Téètras Magic est un petit éditeur situé dans le Nord-Pas-de-Calais, qui a un regard singulier sur l’édition et le livre. Des albums atypiques pour tout public.

 

2 commentaires sur “Le dernier des corbeaux”

  1. Bonjour,
    Merci beaucoup pour votre article. Ça donne du baume au coeur et donne envie de suivre vos articles. En plus vous avez chroniqué plusieurs ouvrages de mon camarade Guillaume Guéraud ! Bonne suite à vous.
    T.Moral

  2. Très contente si ça vous convient. De mon côté, je suivrai votre actu !
    Et en ce qui concerne Guillaume Guéraud, j’aime beaucoup son style, vif sans être racoleur.
    Bonne continuation.

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