Lorsqu’en 1949 Orwell assistait à la publication de son roman 1984, aurait-il pu imaginer que le monde y trouverait toujours autant d’écho 70 ans plus tard ? Féru de dystopies, l’illustrateur brésilien Fido Nesti, en relevant des résonances flagrantes avec l’actualité de son pays, ne pouvait à l’évidence pas passer […]
Auteur/autrice : Alice
Nous autres – Eugène Zamiatine
En 1920, Zamiatine rédigeait ainsi le journal d’un certain D-503, ingénieur participant à la construction de L’intégral, vaisseau spatial destiné à prêcher le sacro-saint bonheur à travers l’univers, bonheur dont les hommes du futur ont, selon eux, trouvé la recette-clé, nichée dans une rationalisation à toute épreuve et une déshumanisation aux petits oignons. Pensée unique, totalitarisme, et de fait liberté zéro représentent ainsi la satisfaction suprême dans un monde où tout est millimétré, dans un cocon voluptueusement garni de racines carrées et de réflexions savamment mûries.
La forêt / Thomas Ott (Ed. Martin de Halleux)
Grand retour de Thomas Ott avec un récit sans parole sombre et flamboyant dans lequel l’on plonge et replonge avec fascination.
En 25 pages, Thomas Ott trace l’histoire d’un môme un jour de funérailles, qui décide d’aller prendre l’air dans la forêt avoisinante. Un récit très intime, beaucoup plus que les récits de l’auteur compilés dans R.I.P. qui tenaient plus du roman noir, du pulp et de la pop-contre-culture. Plus d’intimité donc, avec ce garçon face à lui-même, ses angoisses et ses souvenirs, dans un univers qui tient à la fois du conte, du rêve et de la chronique sociale.
L’heure de la jointure entre 2020 et 2021 – bilan, voeux et tout le toutim
Tour d’horizon 2020 en une poignée de titres…
L’anguille – Valentine Goby (T. Magnier)
« Mais je ne suis pas handicapée. Je suis différente. On est tous différents, les cheveux, les yeux, la taille, la voix, disons que je suis un peu plus différente. » Camille est née sans bras, un corps pas banal qui n’arrête pas cette ado pleine de vie et d’inventivité. Un très chouette et beau roman sur l’adolescence, la différence, l’amitié, l’acceptation de soi et des autres. A glisser dans toutes les mains !
Entre fauves – Colin Niel (Rouergue)
L’une des petites claques de cette fin d’année avec ce nouveau Colin Niel qui investit cette fois-ci l’univers des gros portefeuilles qui dopent leur adrénaline avec leurs fichues chasses aux trophées. Ici une chasse au lion qui tourne au vinaigre entre la Namibie et les Pyrénées, que nous découvrons au fil des regards entre chasseurs, éleveurs, chassés et gardes nature. Un roman très immersif et véhément, avec son lot de suées et de grincements de dents.
La cane aux oeufs d’or et autres contes d’Afanassiev
Petite halte auprès des contes russes d’Afanassiev avec ici trois contes où rôdent la médiocrité, l’envie, la mort, et surtout un regard amusé et malicieux sur les pleutres et les profiteurs, malmenés avec panache.
Chavirer – Lola Lafon (Actes sud)
Lola Lafon donne voix aux colères assourdies, aux corps tus par ces gestes que ne devraient pas, ces mots qui auraient pu, et cette temporalité qui réveille et révèle, enfin. En 1984, Cléo a treize ans, elle danse, elle rêve, et elle accepte, de jouer le jeu pour une fondation énigmatique, qui saurait lui donner des ailes, si seulement. La prédation sans scrupules, qui fauche en plein vol, cette ère où les bruits couraient sans retenir l’écho, qui éclate un peu plus maintenant. Et cette culpabilité qui fige et creuse. Lola Lafon, tellement puissante, encore une fois. Rentrée littéraire 2020
L’enfant qui cherchait la petite bête et autres contes inédits et retrouvés – Beatrix Beck (Chemin de fer)
Imaginaire narquois, onirisme magique, réalisme débordant, sombres échos, espièglerie maline garnissent ce recueil qui dresse un beau tableau de l’univers de Beatrix Beck. Une fantaise élégante et une langue aiguisée dans ces contes à glisser audacieusement dans de nombreuses mains de tous âges.
20 bonnes excuses pour siroter peinard sous le plaid
Tout ou presque est dans le titre. Vous trouverez dans cette liste des idées lecture à accompagner d’un thé épicé, d’un vin chaud ou d’une bière de Noël…
L’accident de chasse – David L. Carlson & Landis Blair (Sonatine)
Impressionnante BD qui en appelle au roman noir, à la chronique sociale et à la littérature, sur fond de Chicago des années 30-50. Chicago, 1959, un homme, qui a toujours fait croire que sa cécité était due à une partie de chasse mal engagée, fait la lumière sur son histoire […]
Bandini – John Fante (Bourgois)
Les histoires de famille au coeur de cette ode aux classiques impulsé par Moka et Fanny chaque mois depuis le printemps. Bandini, premier roman de John Fante publié en 1938 et premier volume du cycle Bandini, quatuor de textes largement autobiographiques autour de l’histoire d’une famille d’émigrés italiens aux Etats-Unis. […]
Le bal des porcs – Arpád Soltész (Agullo)
Polar slovaque musclé qui passe au crible jeux de pouvoir et magouilles politiques en tout genre. Dans un coin paumé de Slovaquie, une jeune toxicomane est retrouvée morte. Pas inattendu en soi sauf si l’on se penche sur les disparitions qui s’accumulent au sein d’un centre de désintoxication, géré par […]
Mendiants et orgueilleux – Albert Cossery (Joëlle Losfeld)
Portraits croisés dans les rues du Caire, de mendiants poètes et philosophes, administratifs tire-au-flan par grandeur, policier en quête d’autres possibles, et prostituées qui, si elles ont du tempérament, s’en prennent aussi dans la tronche. Albert Cossery revendiquait son oisiveté et a véhiculé beaucoup de ses aspirations dans ces personnages. […]
Barlovento – Mazzitelli & Alcatena (Warum)
Splendide BD de piraterie sur fond de légendes mystérieuses, dans un décor magnifiquement planté par un graphisme de toute beauté. Dans une époque que l’on pourrait situer aux entournures du dix-septième siècle, Ulysse Lean, jeune homme issu de l’aristocratie anglaise, découvre que son père, qu’il n’a pas connu et autour […]
Le coeur synthétique – Chloé Delaume (Seuil)
Beau coup de coeur pour ce nouveau Chloé Delaume qui décidément fait ça bien, écrire, et dire les femmes, et cerner la société qui nous entoure et ce qui s’y joue. Roman couronné par le prix Médicis 2020
Dans mon village, on mangeait des chats – Pelaez & Porcel (Bamboo)
Fameuse et goûtue cette sombre BD, entre sourires louches, crime organisé et pâté du dimanche. « Il doit être bon, il est au prix du foie gras. »
Ferragus – Honoré de Balzac
Place à Balzac donc, avec ce premier volume de L’histoire des Treize, au coeur de l’ambitieux cycle La comédie humaine, où Balzac excelle en matière de romantisme noir par lequel nous assistons à de l’amour intense aux débordements maladifs, à de la passion renversante à se faire cruelle, à la violence des tempéraments emportés dans leur démesure, aux mystères sourds et obsédants à en crever.
Les héritages – Gabrielle Wittkop (C. Bourgois)
Coup de projecteur dans l’actualité littéraire sur l’oeuvre de Gabrielle Wittkop pour le centenaire de sa naissance, alors qu’elle s’est éteinte en 2002, avec notamment deux textes (ré)édités ce mois-ci, chez Christian Bourgois et chez Quidam. Avec Les héritages, nous traversons l’histoire d’une villa bâtie à la fin du dix-neuvième en bord de Marne, d’un siècle et de ses gens, sous les traits acides de Gabrielle Wittkop, qui démontre encore une fois une puissance littéraire folle.
Stanley Greene. Une vie à vif / JD Morvan & Tristan Fillaire (Delcourt)
Excellente BD qui retrace la vie du photographe Stanley Greene, du gamin de Brooklyn qui a frayé avec les Black Panthers, traîné avec les punk, trempé dans la dope, jusqu’au photographe-reporter qui s’est révélé lors de son passage à l’Est lors de la chute du mur. Les photos croisent les images de Tristan Fillaire, les époques et les lieux s’enchevêtrent, mettant en lumière la violence du monde, comme le voyait Greene en somme !