« Et maintenant où se trouve le remède ? Il réside en un mot, le seul ayant amené l’équité partout : « liberté » ! Plusieurs siècles successifs de liberté, voilà la seule chose qui permettra que ces idées pestiférées tombent en désuétude et se désintègrent. »
Catégorie : Re-Voir la société
Quinzinzinzili – Régis Messac
Un gaz hilarant mortel balaye l’humanité à l’exception de quelques survivants dont une poignée d’enfants et leur précepteur partis visité une grotte. Régis Messac imagine la quête de nourriture et d’eau, les pouvoirs qui s’instaurent, le langage qui mute… Une dystopie publiée en 1935 qui n’a pas pris une ride.
Kukum / Michel Jean (Dépaysage)
Michel Jean est issu de la communauté innue de Mashteuiatsh, du côté du lac Saint-Jean au Québec. Par sa plume, sa kukum – sa grand-mère – se raconte. Orpheline québécoise née en 1882, élevée par un couple de fermiers, elle tombe folle amoureuse d’un innu à l’adolescence et quitte très […]
Ceux qui trop supportent – Arno Bertina (Verticales)
Pendant quatre ans, Arno Bertina est allé à la rencontre des salariés, a recueilli les témoignages de ce combat des hommes face aux stratégies économiques. Un récit documenté et documentaire à teneur littéraire, une gloire à l’intelligence collective, au poids du groupe solidaire face au poids des deniers. Un sacré boulot, et une lecture absolument nécessaire, surtout en ces temps pré-électoraux…
L’Oiseau rare – Guadalupe Nettel (Dalva)
Guadalupe Nettel s’attache dans ses romans aux quêtes individuelles, aux drames ordinaires, aux fluctuations de nos vies. Dans L’Oiseau rare, c’est la question de la maternité qui est soulevée, avec une belle trempe et une solidarité lumineuse.
Harvey – Emma Cline (La Table Ronde)
Emma Cline semble aimer percer l’envers de personnalités à la chaleur humaine mal placée. Après Charles Manson dans The Girls, elle s’attaque à Harvey Weinstein dans un court roman tendu et irritant.
Shuggie Bain – de Douglas Stuart (Le Globe)
Enorme coup de coeur pour ce roman noir, prolétarien, social, qui pose le regard sur les laissés-pour-compte. Ce n’est certes pas très nouveau, on peut d’ailleurs rapidement penser à pas mal de monde, à ceci près qu’ici, lumière est faite sur une anti-héroïne, qui oscille à la fois péniblement et admirablement entre destin peu engageant, alcool réconfortant, entourage à couteaux tirés, atmosphère Thatchérienne en guise de rouleau compresseur et bouffées d’espoir sursautantes.
Viendra le temps du feu – Wendy Delorme (Cambourakis)
On n’attendait pas forcément Wendy Delorme dans un virage dystopique et pourtant ça lui va comme un gant !
Wendy Delorme est universitaire, performeuse, activiste féministe queer, écrivaine. Dans ce nouveau roman, cinq figurent s’articulent, Ève, Louise, Rosa, Raphaël, Grâce. Par leurs regards et leurs luttes se déploie un flamboyant et incandescent roman, très sororal, qui se tisse de part et d’autre du fleuve où tout s’est joué et où tout reste à faire.
Nellie Bly – Dans l’antre de la folie – Ollagnier et Maurel (Glénat)
Très chouette adaptation du récit de la journaliste Nellie Bly paru à la fin du dix-neuvième siècle, s’appuyant sur son internement à l’asile de Blackwell, New York. Dans ce reportage, Nellie Bly pointe les dérives de l’autorité par charité publique, la bonté qui se mue en coups et torture, la folie qui guette comme repli, et l’argent qui entre dans certaines poches au détriment de sa destination initiale, par cupidité, simple profit ou étroitesse d’esprit qui ici, sous couvert d’aliénation mentale, se permet bien des choses.
A la ligne, feuillets d’usine – Joseph Ponthus
« J’écris comme je pense sur ma ligne de production
divaguant dans mes pensées seul déterminé
J’écris comme je travaille
A la chaîne
A la ligne »
La vie à l’usine, les corps qui morflent, les cadences à tenir, Joseph Ponthus écrit la condition ouvrière dans son jus, avec éloquence, humanité et sensibilité. Un indispensable !
Goodnight Paradise – Dysart & Ponticelli (Panini comics)
Excellent comics ambiance polar social, plages californiennes, poisse et crime crapuleux, avec une enquête menée par Eddie, sans-abris qui refuse de lâcher l’affaire après avoir découvert le cadavre d’une jeune fugueuse qui n’émeut pas grand monde. Un récit palpitant et saisissant.
Je suis Camille -Jean-Loup Felicioli (Syros)
Coup de coeur pour cette histoire très fine sur la transidentité. Différence, amitié, tolérance, au coeur de cet album touchant, à partager dès 7-8 ans pour apprendre à se poser les bonnes questions.
Ce qu’il faut de nuit – Laurent Petitmangin (La Manufacture de livres)
Premier roman remuant sur une relation père-fils ébranlée par des convictions politiques rances et un dérapage qui sent le roussi. Pudeur, humilité, un portrait à hauteur d’homme, impressionnant.
Les orageuses – Marcia Burnier (Cambourakis)
Premier roman de la magnifique collection Sorcières chez Cambourakis qui publie habituellement des essais soutenant des regards du féminisme résistant et revendicatif, et faisant lumière sur des voix qui expérimentent, disent autrement, et que l’on lit encore peu. Ici un roman qui se place directement dans ce sillage, avec un texte fort sur un sujet tristement presque banal et pourtant encore bâillonné au possible, le viol. Un très beau texte, fort, pudique et sororal, qui dit les doutes, les maladresses et la douleur qui rendent bancales, et encore plus si on les glisse sous le tapis.
Chavirer – Lola Lafon (Actes sud)
Lola Lafon donne voix aux colères assourdies, aux corps tus par ces gestes que ne devraient pas, ces mots qui auraient pu, et cette temporalité qui réveille et révèle, enfin. En 1984, Cléo a treize ans, elle danse, elle rêve, et elle accepte, de jouer le jeu pour une fondation énigmatique, qui saurait lui donner des ailes, si seulement. La prédation sans scrupules, qui fauche en plein vol, cette ère où les bruits couraient sans retenir l’écho, qui éclate un peu plus maintenant. Et cette culpabilité qui fige et creuse. Lola Lafon, tellement puissante, encore une fois. Rentrée littéraire 2020
Le coeur synthétique – Chloé Delaume (Seuil)
Beau coup de coeur pour ce nouveau Chloé Delaume qui décidément fait ça bien, écrire, et dire les femmes, et cerner la société qui nous entoure et ce qui s’y joue. Roman couronné par le prix Médicis 2020
[Rentrée littéraire 2020] La grâce et les ténèbres – Ann Scott (Calmann Levy)
Dans son dernier roman, Ann Scott nous plonge dans la lutte souterraine contre le terrorisme, où l’on reste en apnée sans tellement d’échappatoire. Un roman dense et très documenté sur ceux qui scrutent les djihadistes sur les réseaux sociaux en vue de les annihiler ou en tout cas déjouer leurs funestes prévisions.
Le sel de tes yeux – Fanny Chiarello (Editions de l’Olivier)
Etre ado, se construire en tant qu’être à part entière, tenter d’affiner et d’affirmer ses sensibilités, c’est ce qu’explore si finement Fanny Chiarello, à travers le portrait de Sarah, qui ouvre les yeux sur son homosexualité dans une famille pour qui ça ne coule pas de source. Un très beau texte, touchant et juste.
Mes bien chères soeurs – Chloé Delaume (Seuil)
Durant le confinement, un certain nombre d’éditeurs proposent la lecture libre d’une partie de leur catalogue. Vous trouverez un certain nombre de propositions ici. Parmi les suggestions des éditions Seuil, le dernier livre de Chloé Delaume, un manifeste féministe mordant, réjouissant et vivifiant que je vous recommande chaudement.
Tout nu ! Le dictionnaire bienveillant de la sexualité (éd. du Ricochet)
N’y allons par quatre chemins, si vous avez un.e ado à la maison, achetez ce livre et laisser le trainer dans sa chambre. Myriam Daguzan Bernier a imaginé le livre qu’elle aurait voulu lire adolescente, et elle tombe juste, répondant simplement et sans fards aux questionnements que peuvent se poser les jeunes à un moment ou à un autre. Un texte qui vise l’inclusion, le vivre ensemble, le respect, mais aussi, et la curiosité et le plaisir. Un incontournable !