Benvenuto Gesufal est l’homme de main du patrice Leonide Ducatore, Podestat de la république de Ciudalia ; le pouvoir amène parfois ce dernier à prendre des décisions radicales : heureusement Don Benvenuto est là pour se salir les mains…
Gagner la guerre, et après ? Alors que la République de Ciudalia vient de remporter une victoire décisive sur le Royaume de Ressine, la partie vient de commencer sur l’échiquier politique de la cité portuaire.
Benvenuto, dont l’oeil est aussi perçant que la langue acérée, nous emmène dans les arcances du pouvoir de la République : comme à Rome, deux hommes (les podestats) gouvernent avec l’aide du Sénat composé des chefs de famille noble ciudalienne. Leonide Ducatore se retrouve, pour un temps, le seul podestat muni des plein pouvoirs et il va tout mettre en oeuvre pour maintenir sa position dominante. Vendetta, trahison, assassinat…l’ascencion sociale ne semble pas fonctionner au mérite dans la Cité.
Benvenuto, assassin membre de la guilde des Chuchoteurs et employé par Leonide Ducatore, va être chargé d’une mission délicate qui aura des répercussons insoupçonnées. Gagner la guerre est en fait son témoignage, « son grand projet » qui éclairera le citoyen sur les agissements de ses élites…
Avec brio, il nous raconte ses aventures : qu’elles se passent dans les entrailles de Ciudalia (personnage à part entière dans ce roman) ou dans la campagne de la Marche Franche, dans le silence feutré des salons de la noblesse, dans les auberges animées de Bourg-Preux ou dans les bois insondables de Vieufé. Le mystère s’épaissit peu à peu autour de lui, les intrigues se mêlent et tissent un canevas riche dont il est l’un des fils – parfois à son corps défendant.
Les personnages prennent vie sous la plume de l’auteur : ils sont dotés d’une histoire et d’une psychologie très travaillées qui rendent leurs agissements plus que crédibles. Et au détour d’une phrase, s’ouvre tout un pan de leur histoire que l’auteur pourrait aisément nous livrer mais qui reste parfois dans l’ombre des évènements décrits : le monde de Jaworski n’en a que plus d’épaisseur et le lecteur de vouloir se perdre dans les sentiers inexplorés des Vieux Royaumes.
Nous parlions de plume, et quelle plume ! Jean-Philippe Jaworski la maîtrise aussi bien qu’un bretteur manie son épée ! Et il fait souvent mouche lorsqu’au détour d’une tournure il vient surprendre son lecteur. Un vocabulaire riche et précis dans tous les registres de langue (eh oui, il arrive bien souvent à Benvenuto de jurer comme un charretier !), un équilibre entre les descriptions, scènes d’actions et dialogues et un style incomparable : l’auteur a encore frappé ! Je dis « encore » puisque j’avais découvert Jean-Philippe Jaworski au détour de ses nouvelles, réunies dans l’excellent recueil Janua Vera, et qui se passent dans le Vieux Royaume au même titre que Gagner la guerre. D’ailleurs, Benvenuto est le héros d’une des nouvelles de ce recueil, intitulée « Mauvaise donne », qu’il est préférable d’avoir lue avant Gagner la guerre. Dans ses nouvelles, Jean-Philippe Jaworski cultive l’art de la chute ! Ici, la chute, qu’elle soit à la fin d’une phrase, d’un chapitre ou du roman lui-même est toujours mise en scène avec talent !
Vous l’aurez compris, c’est un coup d’coeur !
Le + :
Saluons le très beau travail des moutons électriques qui nous livre un bel objet. Une édition reliée a été publiée en 2013.
L’ouvrage a obtenu de Prix Imaginales du meilleur roman francophone en 2009
Jaworski a un style impressionnant… Cet auteur me fiche des complexes ! ^^
J’admire vraiment sa plume.
Je n’ai pas encore lu de romans de cet auteur mais ça me tente bien. Je vais le noter.