Marie Gervais milite pour une « éducation créative ». C’est d’ailleurs le nom de son site qui fourmille d’idées à piocher. Elle a déjà publié plusieurs livres sur le sujet, notamment Pâtes créatives (comment fabriquer sa pâte à sable, pâte à papier, craies…) et Libérons la créativité de nos enfants. Elle est également cofondatrice de la toute nouvelle Ecole Dynamique, ouverte en 2015 à Paris.
Dans La famille buissonnière, elle propose un retour à la nature, de façon globale, pas juste une petite balade en forêt « pour prendre l’air » (même si c’est déjà bien), mais un esprit résolument tourné vers l’extérieur et le monde qui nous entoure.
Marie Gervais présente d’abord un état des lieux, constate un phénomène général de repli dans le foyer et le manque de connaissance flagrant de la nature au sens large, par confort et par crainte aussi. Elle expose son positionnement, replace la question de la nature dans son contexte, évoque la place des parents et l’importance de leur engagement dans cette démarche, invitant à faire de la vie une aventure.
Mais ce livre c’est aussi et surtout des pistes d’activités à proposer à s’approprier. Des activités pour la campagne, la ville, à faire dans un jardin, sur un balcon ou dans une cuisine. Certaines activités ne demandent presque rien, de l’écoute, du bon sens souvent, qu’il est toujours bon de rappeler tellement il peut être simple de l’expédier aux oubliettes faute d’y penser. D’autres sont franchement originales et offrent de véritables possibilités de se réancrer dans le monde naturel. En fait c’est essentiellement un hymne à la lenteur, une invitation à prendre son temps, dès que c’est possible, apprendre à sortir du quotidien pour observer les trottoirs et rebondir sur les petites choses qui nous entourent.
Dans la forme, le livre est bien pensé, clair, précis, avec de nombreuses photos. Théorie et pratique sont intimement liées, et les catégories dans lesquelles sont réparties les activités sont franchement intéressantes et innovantes : Ralentir / Bouger (ne rien faire, jardiner, ramasser des feuilles mortes, des idées pour transformer une ballade en chasse aux trolls), Protéger / Risquer (apprendre les bons gestes, cueillir, grimper, escalader), Développer son attention / Libérer son énergie (land art, peinture, marcher les yeux bandés), Etre seul / Faire ensemble (collectionner, faire une cabane, Visions micro et macroscopiques (insectes, herbier, arbre généalogique).
En annexe, de nombreuses listes, de choses à faire, souvenirs à faire remonter à la surface, questionnements, activités à proposer en fonction des saisons, de l’endroit où l’on se trouve, et une bibliographie très riche, avec des ouvrages théoriques pour aller plus loin notamment en matière de pédagogie, des livres d’activités, et des sites web à visiter.
La démarche de Marie Gervais est séduisante, tout comme la notion d’éducation créative. L’appellation et ce qu’elle induit m’inspirent, beaucoup plus que ce que l’on nomme couramment l’éducation bienveillante, terme qui me fait tiquer à bien des égards, sous-entendant que si l’on ne s’inscrit pas dans ce courant, nous ne le sommes pas, bienveillant, et que la malveillance nous guette… L’éducation créative est beaucoup plus ouverte, absolument pas culpabilisante, et implique de se renouveler constamment, de se laisser surprendre et de tenter l’aventure.
Si ce livre s’adresse avant tout aux parents, il peut tout à fait être feuilleté par tous, même sans enfant à proximité, car c’est une réflexion beaucoup plus large, sur le retour à la verdure, sur notre façon d’appréhender le monde.
La famille buissonnière / Marie Gervais. Editions Delachaux et Niestlé, 2016
Lu dans le cadre de Masse critique. Merci à Babelio et Delachaux & Niestlé pour cette découverte.