« J’ai passé le premier été d’après-guerre chez des parents éloignés, à la campagne.
Au cours de ces semaines, le village m’était apparu comme un îlot de calme. L’un des derniers lieux épargnés par cette violente tempête que nous venions de traverser.
Des années plus tard, alors que la vie était revenue à la normale et que cet été n’était plus qu’un heureux souvenir, j’ai retrouvé mon village dans les pages d’un journal.
Il était devenu le « village meurtrier » et , dès lors, je n’ai plus cessé de penser à ce qui était arrivé.
En proie à des sentiments mêlés, j’ai décidé de m’y rendre à nouveau. Ceux que j’y ai rencontrés ont accepté de me parler du crime. De parler à quelqu’un d’à la fois étranger et familier. Qui ne resterait pas, qui écouterait puis repartirait comme il était venu. »
Tannöd, quelque part en Bavière, dans les années 50. Les Danner sont sauvagement assassinés dans la ferme familiale. Le père Danner, patriarche dans toute sa splendeur, la mère, sa fille et les deux petits derniers. L’affaire a fait grand bruit mais le coupable n’a jamais été retrouvé. Quelques années plus tard, les témoins reviennent sur l’histoire. Les voisins, le curé, l’instituteur, le mécanicien de passage, chacun revient sur cette famille, sur les jours précédent le drame. Les langues se délient et petit à petit refont surface de lourds secrets, de graves abus, des histoires de gros sous.
Andrea Maria Schenkel s’inspire d’un fait divers survenu en 1920 en choisissant de situer l’histoire en 1950. Le prétexte à convier l’après-guerre et les traumatismes qui en découlent dans un univers rural déjà bien rude. Car au delà du crime, c’est surtout une ambiance qui est dépeinte, celle d’une campagne profonde, rongée par les non-dits et la jalousie, et où la religion est omniprésente.
Un roman très court avec des chapitres qui le sont tout autant, rythmant les témoignages. Un exercice de style pas évident que l’auteure a réussit à déjouer pour son premier roman en choisissant la concision comme crédo. Une bonne découverte qui donne envie d’aller jeter un œil du côté de ses autres titres, et de lire De sang froid de Truman Capote, vanté en quatrième de couverture.
En bref, un bon petit roman noir à avaler d’un seul trait !
La ferme du crime / de Andrea Maria Schenkel. Actes sud (Actes noirs). 2006. 158 p.
(Challenge Thrillers et Polars #05)