La gigantesque barbe du mal

Nous sommes ICI, un endroit où règnent l’ordre et la netteté. Tout est parfaitement soigné, millimétré, tous les individus se ressemblent tellement ils sont lisses, le vêtement impeccable, la maison proprette, les haies taillées, les trottoirs soignés. Tout est prévisible dans cette ville où l’on se cale dans confort ouaté du familier qui ne dépasse pas.
Au-delà d’ICI, il y a la mer. Ici, les côtes ne sont pas convoitées, car la mer indique la fin d’ICI, la porte ou-verte sur l’inconnu et surtout sur LA. Là, on ne sait pas trop ce qui s’y trouve, des légendes circulent, à n’en pas douter, le chaos guette.

Dave vit ICI. Dave n’a pas un poil sur le caillou, mis à part quelques-uns perdus entre les sourcils, ceux plantés sur sa perruque, et un misérable poil posté sous le nez. La journée, il collecte des données, présente des tableaux. Chez lui, il s’adonne à ses deux passions, le dessin et les Bangles, croquant les passants devant sa fenêtre en écoutant à fond Eternal Flame.

barbe1bUn matin, les données que Dave a l’habitude de traiter sont anormales. L’inopportun monte en stress aux joues de notre pauvre Dave qui voit bientôt son poil s’allonger, sa barbe naître et grossir jusqu’à ne plus s’arrêter et prendre des proportions ahurissantes qui imposeront des déviations et bouleverseront l’ordre l’établi.

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Pour sa première BD, Stephen Collins fait très très fort avec cette fable contemporaine qui dénonce la peur de l’autre, le voyeurisme, les médias, la société du spectacle en somme. Le scénario se déploie dans une mise en case qui sort de l’ordinaire, précise et structurée mais aussi complètement fantaisiste avec des jeux d’enchainement et de perspective. Le dessin entièrement crayonné est fabuleux.
Un ensemble à la fois décalé, poétique et délicat, à mi-chemin entre Roald Dahl et Kafka.

La gigantesque barbe du mal / Stephen Collins. Cambourakis, 2014

Et en hommage à Dave…

 

2 commentaires sur “La gigantesque barbe du mal”

  1. Rho bon. Sur ton avis enthousiaste, j’ai lu ce livre. Enfin cette BD. Et je dois avouer que j’ai été assez mitigée. Mi-figue, mi-raisin ( à dire avec l’accent du sud) comme on dit. Je prépare un petit billet pour mon blog pour te dire !

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