Les heures rouges – Leni Zumas (Presses de la Cité)

« Lorsque Yasmine avait voulu se débarrasser de la chose dans son ventre, la plupart des cliniques d’IVG n’existaient pas encore. C’était juste après l’entrée en vigueur de l’interdiction fédérale. Pour aider à la mise en application de la loi, le ministre de la Justice avait ordonné aux procureurs du pays tout entier de chercher à obtenir les peines les plus sévères possibles pour les candidates à l’avortement. D’envoyer un message. Des filles de treize ans à peine étaient condamnées à des peines de trois à cinq ans d’emprisonnement. Même la fille d’Erica Salter, membre de la Chambre des représentants de l’Oregon, avait été enfermée dans l’établissement pénitentiaire de Bolt River. Le message devait passer. »

Quatre femmes, nommées par leur position dans la société ou la famille, par le regard que l’on porte sur elles. L’épouse, qui a bien du mal à se retrouver, au delà de ce qu’on attend d’elle, par ses obligations familiales et matrimoniales. La biographe, qui cherche à faire un enfant à l’aube de ne plus pouvoir tenter d’essayer et de se trouver bientôt interdite d’en adopter. La fille qui, au contraire, cherche à se débarrasser d’une grossesse non désirée au delà des interdictions en vigueur. La guérisseuse enfin, incarne le rôle de sorcière avec ses remèdes naturels et sa vie en marge.

Quatre portraits de femmes, qui tentent de garder la tête haute malgré leurs droits qui se resserrent. Quatre tranches de vie, destins croisés de femmes dans une Amérique à peine futuriste. Leni Zumas met le doigt sur la fragilité des droits, en particulier ceux liés aux femmes et à la famille. Avortement, PMA, GPA. Elle pose le morceau sur la table et le défend, insistant sur la méfiance inspirée par les femmes pour les recaler dans ce que l’on attend d’elles. Et en regard, les difficultés d’être aventurière au dix-neuvième siècle. 

Dans la forme, c’est assez raide et les sabots sont un peu gros. Le propos est on ne peut plus contemporain, il y a de quoi dire, de quoi débattre, de quoi défendre, pour autant, ici, le résultat est assez fastidieux et finalement pas si novateur, on enfonce un peu des portes ouvertes. On touille, on touille et il n’en ressort pas tant d’idées nouvelles. Pas inintéressant mais pas si édifiant. Et vous, l’avez-vous lu ? Qu’en dites-vous ?

« Elle ne parvenait pas à croire que l’amendement sur l’identité de la personne était devenu une réalité alors que tant de citoyens s’y opposaient.
Ce qui (l’incrédulité) était stupide. Elle savait – en tant que professeure d’histoire, c’était son métier – combien d’horreurs étaient légitimées au grand jour, contre la volonté de la plupart des gens.
Une fois l’avortement déclaré illégal, avaient annoncé les membres du Congrès, il y aurait plus de bébés susceptibles d’être adoptés. Interdire l’IVG ne causait de mal à personne, avaient-ils affirmé, parce que les gens qui avaient un utérus défectueux ou sperme anormal pourraient simplement adopter ces bébés supplémentaires.
Mais les choses ne s’étaient pas passées ainsi. »

Les heures rouges
Leni Zumas
Presses de la Cité
2018
399 pages

Challenge 1% Rentrée littéraire #07

2 commentaires sur “Les heures rouges – Leni Zumas (Presses de la Cité)”

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