Direction Taïwan !
Dans cette BD-reportage, nous suivons l’auteur de Formose (également édité chez çà et là en novembre 2011) au coeur d’une minorité, les Amis.
Bon, je vous demande de vous concentrer, il s’agit du nom de la minorité aborigène. Les « Amis ». Elle porte d’ailleurs fichtrement bien son nom cette minorité ; elle est amicale. Évidemment, à la lecture, c’est un peu compliqué de faire la différence entre noms propres et noms communs.
« Un Ami m’a proposé d’y travailler dans les champs, donc j’y suis allée. »
Vous voyez le genre !
Bref, Li-Chin Lin narre son séjour au village de Dulan, avec tendresse et un brin de malice, dans un style qui évoque le dessin de Marion Montaigne (le blog, la BD et le dessin animé Tu mourras moins bête). On s’attend donc à lire une bande dessinée de vulgarisation, et ma foi c’est un peu le cas. L’absurde en moins, quoique…
Vous avez lu Persépolis de Satrapi (je n’imagine pas la négative) et vous avez appris des tonnes de choses historiques sur l’Iran sans effort, non ? Ici même chose ! Chang Kaï-Chek, les lois martiales, la « légende de Wou-Fong » racontés pour les enfants (et pour tous les autres). Nous entrons doucement dans le quotidien de gens simples, cherchant juste à renouer avec des coutumes sans rejeter la société actuelle. Pas de quoi faire une émission En terre inconnue, donc. Le problème avec la société actuelle, c’est qu’elle a une fâcheuse tendance à pousser les minorités sous prétexte de rendre service à la majorité. De vouloir construire des hôtels plus gros que prévus (créateurs d’emplois), de vouloir enfouir des déchets radioactifs (pour bénéficier de l’électricité). Les Amis vont protester doucement mais fermement, à leur manière.
Cependant le propos de l’auteur, en suivant ses propres pérégrinations, perd en clarté. Notre héroïne explique les tenants et les aboutissants de l’affaire dans le désordre, donnant l’impression que les actions menées ne sont pas pensées et que les Amis vont échouer dans la sauvegarde de la somptueuse plage de Fudafudak. Nos Amis, même en restant amicaux, s’en sortent pas trop mal, tout compte fait. Leur lutte face au lobby nucléaire et aux intérêts financiers retarde, voire annule des projets et le lecteur est en joie.
L’album est dessiné au crayon, esquissé dans un « gris et blanc » qui a bien du mal à rendre honneur à cet endroit sublime qu’est -semble-t’il- Fudafudak. Même chose pour les costumes folkloriques :
« Tant de couleurs… Les habits des Amis sont SUPERBES ! »
Heureusement, on s’attache aux personnes rencontrées, on apprend beaucoup de choses sur Taïwan, son Histoire, ses peuples, sa géographie. Un chouette album.
Merci à Céline, à Libfly et La Voie des indés. A Li-Chin Lin, aux éditions çà et là. Leur catalogue est proprement incroyable, vous n’imaginez pas les trésors qu’il renferme…
Fudafudak, l’endroit qui scintille / Li-Chin Lin. Editions Ça et là, 2017