Ce qu’il faut de nuit – Laurent Petitmangin (La Manufacture de livres)

Impressionnant premier roman, chronique sociale et humaine autour de la relation parent-enfant, des choix que l’on ne valide pas, des fossés qui se creusent, du temps qui échappe.

L’histoire d’un père, ouvrier à la SNCF, syndicaliste bien à gauche avec une conscience de classe forte, qui ne trouve qu’à se murer dans le silence lorsqu’il découvre que l’un de ses fils passe son temps avec la clique fascisante du coin. Le drame se jouera jusqu’au bout avec un dérapage fatal qui les ébranlera tous (sans rien divulgâcher). Laurent Petitmangin se frotte à la corde sensible des choix des enfants, lorsqu’ils prennent leur envol dans une direction diamétralement opposée. Que dire, que faire. Et qui plus est ici, avec l’exemple d’un combat politique abjecte, et qui pourtant trouve toujours preneur.

« Puis est arrivé le moment où Fus avait voulu partir avec ses copains, d’abord Montpellier, et l’année d’après l’Espagne. Je ne les aimais pas trop ses copains, je ne les connaissais pas vraiment, ils ne passaient jamais à la maison, mais pour ce que j’en voyais, ils ne me plaisaient pas. Ils n’étaient pas du coin, ils venaient au village à moto, des petites cylindrées qui devaient coûter les yeux de la tête, je ne savais pas où ils trouvaient cet argent. Leur tenue non plus ne me plaisait pas. Je n’avais jamais trop aimé les treillis. Ni les cheveux coupés à la para. Mais je n’avais pas osé le dire à Fus. »

Un roman très fort, très humble, à hauteur d’homme. Le portrait d’un père qui lutte avec lui-même sans doute plus qu’avec les autres, tiraillé entre ses convictions, ses principes, ses fondements, et l’amour sans faille même si bien amoché. A découvrir absolument.

« J’avais finalement compris que la vie de Fus avait basculé sur un rien. Que toutes nos vies, malgré leur incroyable linéarité de façade, n’étaient qu’accidents, hasards, croisements et rendez-vous manqués. Nos vies étaient remplies de cette foultitude de riens, qui selon leur agencement nous feraient rois du monde ou taulards. »

Ce qu’il faut de nuit
Laurent Petitmangin
La Manufacture de livre
2020
187 pages

3 commentaires sur “Ce qu’il faut de nuit – Laurent Petitmangin (La Manufacture de livres)”

Répondre à PatiVore Annuler la réponse.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.