Qui est ce vieil homme qui entre avec cet air étrange et l’allure pressée dans le salon d’Euripide ? Pourquoi prétend-il être le père du jeune Zissis ? Celui-ci est bien fils du concierge, mais les concierges sont quelques-uns, et nombreux sont les jeunes qui aiment les motos.
Le salon de coiffure est situé sur une place d’Athènes, au carrefour des rencontres entre les individus, les va et vient, et au cœur de la vie du quartier. Euripide reçoit, coiffe ces messieurs dames, taille les poils disgracieux des barbes hirsutes, écoute les clients.
Ce jour-là, une scène absurde se tient, entre dialogue de sourds et scénette digne d’un sketch. Mais sur quoi repose le malentendu ? Sénilité de passage, espoir désespéré ou recoin d’un grain de folie ?
Ménis Koumandaréas fait preuve de grand talent dans cette nouvelle au parfum doux-amer, mi-figue mi-raisin entre drôlerie absurde et pointe de nostalgie. Les dessins de Michel Barzin appuyés de grands aplats bleus-grecs participent un peu plus à ce sentiment.
Cette nouvelle est extraite du recueil Leur parfum me fait pleurer, paru initialement il y a presque vingt ans. Pour l’occasion, la fin a été modifiée par l’auteur, pour que la nouvelle soit autonome. Car l’éditeur nous explique que le recueil relie les nouvelles entre elles. Ma curiosité est piquée, j’aurais bien fait davantage connaissance avec le quartier et les habitants de cette place, et retrouver Euripide et ses scènes loufoques de la vie ordinaire.
Ecouter un extrait :
Ménis Koumandaréas est décédé il y a peu de temps, assassiné le 6 décembre 2014 à l’âge de 83 ans. L’incongruité de cette fin réside notamment dans son texte « Trésor du temps », titre curieusement révélateur pour ce livre autobiographique qui évoquait notamment son assassin.
Le fils du concierge / Ménis Koumandaréas. Editions Esperluète, 2015
Lu dans le cadre de La Voie des Indés.
Un grand merci à Libfly et aux éditions Esperluète pour cette lecture.