Marguerite n’aime pas ses fesses, de Erwan Larher

Marguerite n’aime pas ses fesses, ni les parties de jambes en l’air, ni la politique. Elle est un peu tarte à la crème Marguerite, un peu tiède, elle semble un peu hors du temps avec ses rêves de famille Ricoré. Par chance elle a rencontré Jonas, qui l’air de rien vit à ses crochets, s’intéresse à la politique (aime surtout faire la révolution dans son canapé) et aux jeux vidéos, mais avec qui elle partage une libido proche du néant, du moins c’est ce qu’elle croit, car secrètement, le désir le dévore et l’absorbe ce cher Jonas, qui aspire à être farouchement observé plus souvent qu’à son tour.

Ironie du sort, la jeune femme qui n’a aucune conscience politique, n’y comprend pas grand-chose d’ailleurs et du coup ne s’y intéresse pas, est amenée à rédiger le dernier tome des mémoires de Aymeric Delaroche De Montjoie, alias DDM, ancien Président de la République. Pour le coup, ça la changera des piges et des relectures sans saveur. Quand Marguerite se retrouve nez à nez avec un DDM lubrique qui a perdu la boussole, c’est le grain de sable dans le moteur, le premier domino qui tombe, bref le début d’une série d’événements qui la marqueront pour un paquet d’années.

« Tu ne crois pas qu’il y a des problèmes un peu plus importants que ton cul ? s’agacerait-il. Je ne sais pas, tiens, au hasard, la guerre civile en Ukraine. » Son mec excelle à relativiser les angoisses des autres. Et ce n’est pas parce qu’on peut certainement en trouver, après quelques sommaires recherches, de plus importants que son cul plat n’est pas un problème.

Je ne vais pas en dire trop, ce roman se lit d’une traite et il serait bien dommage de gâcher le plaisir de la surprise. Erwan Larher signe un roman hyper contemporain, très ancré dans l’actualité et bourré de références dans lequel il trouve le moyen de mettre le doigt exactement là où il faut. Ses portraits sont certes très stéréotypés, le trait est grossi, à la manière d’une caricature, mais il ne bascule jamais (ou presque) dans le cliché. Il y a beaucoup de vrai dans ce roman, certaines scènes et discussions ont un petit goût de déjà-vu et font sourire, forcément, on en connaît des comme ça, on s’y retrouve même un peu parfois.

Avec subtilité, Erwan Larher saisit les rapports entre les individus, la place du corps et du sexe dans notre société et dans nos vies, le jeu des apparences, le fossé entre les convictions, les envies et ce que l’on est prêt à sacrifier, les angoisses sous-jacentes. En parallèle, une ambiance polar avec une enquête dans les sphères politiques qui en dit long sur les dessous de la République (voire de la raie publique). Des rapprochements bien sentis avec des hommes politiques ou des affaires passées, un mélange de finesse et de gros sabots qui n’est pas sans rappeler Jean-Bernard Pouy et sa clique.

Un roman impertinent et caustique à glisser dans son sac et à offrir, pour sûr qu’il plaira.

Marguerite n’aime pas ses fesses / Erwan Larher. Quidam éditeur, 2016

Lu dans le cadre de La Voie des indés, en partenariat avec Libfly et Quidam.

2 commentaires sur “Marguerite n’aime pas ses fesses, de Erwan Larher”

  1. Un grand merci pour m’avoir fait découvrir ce roman. Je me suis beaucoup amusée en le lisant ! Un vrai coup de cœur pour cette gentille Marguerite 🙂

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