Mathilde est une femme sans borne. Capable de se donner entièrement pour les siens, elle est aussi dotée d’un puissant instinct de survie, celui qui la fait prendre ses cliques et ses claques un beau jour, presque sur un coup de tête.
« Elle est folle, elle n’a pas de limite, elle ne sait pas ce que c’est. Moi, j’ai toujours été mesuré, cartésien. Je pèse le pour et le contre, je ne suis pas une tête brûlée. Seulement, j’aime sa folie. Sa façon qu’elle a de faire péter un plomb à la vie. »
Nous assistons à sa rencontre avec Jérôme, au fondement de leur couple, l’arrivée de leur enfant Louis, les hauts et les bas, les très bas même, les pleurs incessants, les nuits qui n’en sont plus, les coups durs, leurs envies aussi, leurs projets de nouveau départ, leur déménagement au vert, dans un joli coin de Bretagne, et progressivement au sentiment pernicieux d’insatisfaction chronique qui s’installe.
Avec des phrases courtes et des mots simples, Grégory Nicolas tisse un texte très sensible et dévoile l’envers du couple. Il creuse les sentiments, et même plus loin que ça, les ressentis. Un regard très réaliste qui questionne, interroge les notions de couple et de famille, l’amour dégringolant, décrit avec beaucoup de justesse le manque d’air, la tentation de tout plaquer, le brin de folie et l’égoïsme suffisant au franchissement de la ligne.
« L’idée de partir ne m’est pas venue d’un coup. Elle s’est imposée à moi, contre moi. Ça a commencé tout doucement, puis ça a grandi. J’avais beau lutter de toutes mes forces, me dire que c’était impossible, que je ne pouvais pas faire ça, il n’y avait rien à faire, je ne pouvais pas résister. J’étais obsédée par l’idée de la fuite. »
L’histoire est évoquée sous plusieurs angles, un peu à la manière d’un roman choral. Eux d’abord avec la voix du narrateur, puis Mathilde prend la parole, et enfin Jérôme. Une même histoire où les éléments s’entrecroisent, s’ajoutent, se retirent, se nourrissent, avec au fil des pages, la clé du drame qui s’inscrit.
Un roman qui chavire par sa justesse. Une histoire simple qui s’épaissit progressivement, subtilement, touchante et étourdissante.
Mathilde est revenue / Grégory Nicolas. Editions Rue des Promenades, 2015
Un grand merci à Rue des promenades pour cette lecture entêtante.
Tout à fait juste, c’est un roman qui s’épaissit progressivement.