Délinquance et parcours familiaux hors pistes
Wilfried est placé en famille d’accueil à l’âge de 8 mois. Tout se passe globalement pas trop mal, voire même plutôt bien, jusqu’à ce que son histoire lui revienne dans les dents à l’adolescence, à l’instant charnière où se croisent quête d’identité, prises de bec, autonomie balbutiante, colère ravalée et accumulée qui finit par faire des étincelles.
La PJJ, protection judiciaire de la jeunesse, est peu connue, ou tout du moins les contours sont assez flous pour la plupart d’entre-ceux qui ne sont pas directement concernés. Le journaliste Mathieu Palain s’intéressait depuis un moment à la question, par son père qui y exerce notamment, décidant pour finir d’y consacrer son premier roman. Il a pris le parti de s’y plonger totalement aux côtés des éducateurs pour appréhender concrètement le système, donnant à lire un roman à mi-chemin entre le documentaire, le témoignage et la chronique sociale. Un texte fort, touchant et pour cause très juste, qui restitue la réalité du terrain et le travail des éducateurs, pointe les difficultés, les enjeux contradictoires et les flottements, en n’omettant pas les familles et jeunes concernés.
Un roman très actuel et retentissant, dans la lignée du film Polisse de Maïwenn, et qui s’est déjà fait remarquer, à juste titre.
« Marc avait failli quitter la PJJ. C’était en 2010, quand la France dissertait sur l’impunité des mineurs, le retour du couvre-feu et les ados d’un mètre quatre-vingts qu’on devait pouvoir juger comme des adultes. La question revenait immanquablement et elle le mettait hors de lui : « Si on les met pas en prison à la cinquième condamnation, on en fait quoi ? »
Selon Romane, la téléréalité nous avait fait entrer dans une ère d’exclusion.
– Le concept de la Star Ac’, Secret Story et toutes ces daubes, c’est d’exclure ceux qui vivent parmi nous. Qu’est-ce qu’on fait, aujourd’hui, avec un gamin qui dérange ? On l’exclut de cours. Puis on l’exclut du collège. Et quand il arrive chez nous avec son étiquette de délinquant, on nous dit : « Enfermez-le, il faut préserver la société ! »
Sale gosse
Mathieu Palain
Editions L’Iconoclaste
Rentrée littéraire 2019
349 pages
Lu dans le cadre de l’opération Masse critique avec Babelio
Ça à l’air costaud. .. Je le lirai dans quelques temps, avec le retour des beaux jours !