La saga de Grimr – de Jérémie Moreau (Delcourt)

A la fin du dix-huitième siècle, au cœur de l’Islande, le jeune Grimr voit toute sa famille disparaître dans l’explosion d’un volcan, perdant en même temps toute trace de sa lignée, repaire pourtant indispensable pour tout un chacun dans le pays. Grimr fera donc autrement, avec sa force pour bâtir sa réputation. Une force sans commune mesure et un tempérament de fer, avec lesquels il va se forger un destin digne d’une saga, qu’un vieux poète bienveillant n’aura de cesse de garder la trace.

Ce qui saisit d’abord dans cet album, ce sont les paysages à couper le souffle. On plonge littéralement dans les terres d’Islande, sauvages et menaçantes, à la rencontre d’un peuple fortement marqué par la dureté de la vie et très porté sur les superstitions. Jérémie Moreau s’est inspiré de plusieurs épisodes de l’Histoire du pays, notamment le maintient sous le joug Danois qui a plongé le pays dans une profonde misère économique, et la dramatique éruption de lave survenue en 1783.

Le personnage de Grimr est fascinant tant il est à la fois « extra »ordinaire et nourri d’un esprit d’accomplissement peu commun. Il est à la fois taiseux et intègre, foudroyant et respectueux. Jérémie Moreau n’en dit pas trop, il laisse l’image faire son œuvre, les paysages s’imposer. Les actions sont décomposées, accentuant les sentiments, la violence, le danger. Et la puissance qu’incarne Grimr se reflète presque dans les explosions de lave de l’île.

« Les islandais sont les plus courageux des hommes. Et la preuve en est qu’on habite depuis des générations sur l’île la plus dangereuse du monde. Nous habitons sur un monstre, Grimr ! Un monstre qui a le feu au ventre ! » 

C’est à la fois un conte initiatique et un hommage à la force de la nature, une BD d’atmosphère où l’on entend les volcans gronder, un récit âpre qui explore la rudesse, le courage, la volonté, la ténacité. On pense aux veillées contées, aux racontars, à ces histoires improbables, tragiques et magnifiques qui se transmettent, à ces récits entre histoire et imaginaire qui à la fois fascinent et façonnent. En prime, la beauté du paysage, sauvage et insaisissable.

La saga de Grimr / de Jérémie Moreau. Delcourt, 2017 (230 pages)
Prix Fauve d’or du Meilleur album Angoulême 2018

Une autre BD étonnante à découvrir sur l’Islande, contemporaine mais tout aussi énigmatique, Le centre de la terre, de Anneli Furmark. 

D’autres idées BD chez Mo

28 commentaires sur “La saga de Grimr – de Jérémie Moreau (Delcourt)”

    1. Rien n’empêche que tu le feuillettes à l’occas’, mais si le dessin te rebute effectivement, ça risque d’être difficile appréciable… mais sait-on jamais 😉

  1. La couverture ne me tente pas mais ta critique me titille. Donc, j’irai jeté 1 œil. Merci pour ça, Alice, de nous pousser à aller voir ailleurs que dans nos lectures habituelles.

Répondre à Alice Annuler la réponse.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.