Aux fils de l’eau et des saisons, Léa Silhol nous livre un magnifique recueil.
Dans ces contes, elle reprend des figures mythologiques ou folkloriques et trame des histoires originales et poétiques, poignantes ou cruelles, les deux bien souvent. De la Gorgone à Perséphone, des habitants de Féérie au banshee, toutes les croyances de l’humanité servent de matériau à l’auteur qui va façonner cette matière brute jusqu’à en extraire la beauté de son essence.
Nous rencontrons notamment un personnage central dans ses romans – La Sève et le Givre et La Glace et la nuit – dans le très beau récit « À l’image de la nuit » : il s’agit de Finstern, l’Obscur, seigneur d’Irshem, la neuvième Cour d’Ombre. Un délicieux avant-goût si vous voulez découvrir les romans de l’auteur !
Ces contes, captivant, s’enchaînent, tous d’une grande qualité. Un exemple ici de la puissance évocatrice de Léa Silhol.
Les promesses du Fleuve
Dans un royaume qui ne connaît pas les souffrances de la mort, Aclis, une jeune bergère fait paître ses brebis sur la plage au pied d’une colline sur laquelle une tour guet domine le paysage. Il est interdit d’ouvrir cette tour et personne ne gravit le sentier qui y mène. « Par promesse royale, il est dit que tant que la pierre perdure, tant que close est la porte, nul ne mourra sur les terres du roi. »
Un jour, un inconnu l’aborde. Un étranger d’une grande beauté. Il lui confie que son frère est enfermé dans cette tour depuis dix ans. Il en dresse un portrait plus que flatteur. Il lui avoue qu’il ne peut pas approcher de la tour et lui parler mais que quelqu’un qui n’est pas de sa parentèle pourrait peut-être porter nouvelle de sa venue afin de rompre son total isolement. Les graines de la transgression ne tarderaient pas à germer…
Aclis rencontrent les figures mythologiques, Thanatos, Hypnos et Morphée eux aussi personnages de cette histoire : le lecteur les connaît, en tant que créature archétypal ; en plus de ce substrat, Léa Silhol les dote d’une psychologie (parfois surprenante d’ailleurs) et les fait agir en tant qu’individu. Ajoutez à cela la beauté de la langue, la finesse des métaphores et vous obtenez un merveilleux récit, parfois cruel mais toujours beau.
Tous les contes de ce recueil laissent une forte impression, une marque de mélancolie, un sourire ou une larme. Tout le recueil est d’une puissance évocatrice impressionnante. Une petite merveille !
Ces contes sont précédés d’une introduction intéressante de Léa Silhol et d’un travail d’analyse de l’oeuvre de Natacha Giordano qui éclaire ces nouvelles. Un petit plus (s’il en fallait un !) bienvenu.
Ce livre a été lu dans le cadre du winter mythic fiction organisé par le RSF blog
Ca a l’air passionnant !
oui, c’est passionnant ! le seul hic, c’est de réussir à trouver l’ouvrage ! la plupart des oeuvres de Léa Silhol sont épuisées.
Le « hic » a disparu, je crois. 😉
Les « Contes de la Tisseuse » ont été réédités cette année par Nitchevo Factory. Et une version illustrée et augmentée vient de sortir ce mois-ci (« Contes de la Tisseuse suivis de Voix de Fées »). Bonne nouvelle, même si tout le monde guette probablement davantage encore la suite de « Musiques de la Frontière », ce mois-ci !
Merci beaucoup pour cette précision et bonne nouvelle.
De rien Alice, avec plaisir. Je suis un inconditionnel de cette autrice, et partage la joie de tous ceux qui la retrouvent en ce moment 🙂