« J’ai pensé que ce serait une erreur de tuer le chat, en général et en particulier, quand tu m’as parlé de ton projet pour son cadavre. C’était avril déjà, six mois que nous avions emménagé. Les maisons neuves rutilaient sous le soleil mouillé, les panneaux solaires scintillaient sur les toits, et le gazon poussait dru des deux côtés de l’impasse. »
Un couple s’installe dans un genre d’écoquartier flambant neuf, où tout est fait et pensé pour y être bien et en plein accord avec ses choix de vie et à l’abri de la culpabilité environnementale. Devenir propriétaire, la belle affaire, mais qui plus est en adéquation avec la planète, une aubaine ! C’était sans compter sur les voisins, car le curseur de discrétion est une valeur toute personnelle… vite franchi ! D’ailleurs le roman s’ouvre là-dessus, sur l’éventualité de zigouiller le chat des voisins.
« Les soucis sont résistants, ai-je répondu, ils se relèvent du pire comme du meilleur. »
Quatrième roman pour Julia Deck, que je découvre pour ma part, où elle croque les aléas de la vie de quartier en mode Desperate Housewives, jouant avec cette bienveillance attendue à l’égard du monde entier, qui au final, n’empêche en rien à la moutarde de monter au nez, inspirant ici à l’autrice une comédie satirique juteuse et distrayante, ménageant son suspense jusqu’à un dénouement bien senti et qui remettra peut-être de la perspective à vos relations de voisinage.
« Nous nous étions toujours préservés de telles sociabilités. Et voici qu’enivrés par les effluves de barbecue, nous nous transformions en ectoplasmes. D’ici à quelques années, tu serais devenu l’épais mari au t-shirt troué, engoncé dans son pliant et poussant des rires gras tandis que je me changerais en harpie, rouspétant sans fin après les tropismes si prédictibles des mâles. »
Propriété privée
Julia Deck
Editions de Minuit
Rentrée littéraire 2019
173 pages
« Ce policier statufié dans l’angle, qui gagnait son salaire en rayant de sa conscience tout sentiment humain pendant ses heures de service – j’espérais que son épouse le martyrisait, qu’il possédait trois enfants en bas âge et un crédit jusqu’au cou. »