Culpabilité, vengeance, rédemption. Un polar japonais passionnant, dérangeant et subtil.
Un après-midi d’été, jour férié en famille où les enfants s’éclipsent volontiers pour aller jouer dehors, cinq fillettes d’une dizaine d’années jouent au ballon près du gymnase de l’école lorsqu’un inconnu, prétendu technicien en intervention, fait appel à l’une d’elles pour un rapide coup de main. Il la laissera sans vie dans le vestiaire de la piscine. De cet homme, aucune des amies d’Emiri ne peut en dire quoi que ce soit, et l’enquête piétinante est rapidement classée.
Quinze ans plus tard, les jeunes femmes reviennent sur cette tragique journée et comment s’est déroulée leur vie avec la culpabilité que leur a fait porter la mère d’Emiri pendant toutes ses années.
« Je ne vous pardonnerai jamais. A moins que vous ne trouviez le meurtrier avant l’expiration du délai de prescription. Si vous ne pouvez pas le faire, trouvez une façon d’expier qui soit acceptable pour moi. Si vous ne parvenez pas à faire ni l’un ni l’autre, je vous le dis, je me vengerai de chacune de vous. »
Nous tenons là un roman choral qui laisse largement le champs de réflexion ouvert sur le sens et la conséquence de nos actes. Kanae Minato tisse une intrigue tendue et dramatique que nous découvrons au fil des souvenirs des quatre jeunes femmes qui s’adressent à la mère accusatrice. Ce roman reflète les cas de conscience, la profondeur des blessures, le manque et drames qui restent ancrés, avec le jeu terrifiant de rédemption en sus, et ce délai de prescription sur le point de s’achever qui fait monter la pression.
J’avais été déjà très emballée par Les assassins de la 5èB, un polar angoissant et bien ficelé et je suis particulièrement ravie d’avoir recroisé la route de Kanae Minato. On retrouve ici les thèmes de l’enfance, les relations familiales, la place de l’école, l’éducation, la condition humaine et l’art de vivre à la japonaise. L’ensemble manque peut-être un peu de fluidité mais on ne lâche pas le roman qui se lit d’une traite, ce qui en dit déjà long…
La maison d’édition Atelier Akatombo a été fondée en 2017 par l’écrivaine Dominique Sylvain et son époux. Résidant au Japon de nombreuses années et maniant la langue avec curiosité et rigueur, ils ont à coeur de donner à lire des auteurs encore peu représentés en France, en se chargeant eux-même de la traduction des textes qu’ils sélectionnent. Je vous invite à en découvrir davantage à leur sujet dans cet entretien.
Expiations
Celles qui voulaient se souvenir
Kanae Minato
traduit du japonais par Dominique Sylvain, Saori Nakajima et Frank Sylvain
Editions Atelier Akatombo
Rentrée littéraire 2019
228 pages